lundi 20 novembre 2017

Gonflée

     Je sens des bulles d'air dans mon ventre et me demande ce qui me gonfle.
     Oui, je sais. Cela peut sembler assez basique comme analyse. C'est pourtant vrai. Quand quelqu'un me dit "J'ai mal au dos !", je lui demande toujours : "Ah ! tu en as plein le dos ? de quoi ?". La réponse arrive en deux temps : 1) Ah, non, je veux dire, j'ai vraiment mal au dos ! j'ai dû me faire mal aux lombaires/ me coincer en soulevant quelque chose / me refroidir… 2) mais maintenant que tu le dis, c'est vrai qu'en ce moment…

     Donc, qu'est-ce qui me gonfle en ce moment ? (modérément, heureusement pour ma digestion).
     Je pense que c'est le fait d'écrire. De devoir écrire chaque jour la quantité nécessaire pour avancer dans le défi NaNoWriMo.
      Ecrire m'empêche de lire, d'écrire dans mon journal, de prendre le temps de planifier ma journée dans mon bullet journal, de réfléchir à vide, de m'ouvrir totalement à d'autres projets.
       Et en même temps, c'est faux. Ecrire n'empêche rien de tout ça. C'est une question de choix. Je pourrais supprimer une partie du temps que je passe sur internet et lire à la place. C'est vrai. Je me cherche des excuses. C'est vrai que me lever chaque matin et devoir sortir quatre pages de texte est une énorme pesanteur. Je me suis dit plusieurs fois :  "Vivement que ce soit fini". Et en même temps, ce rendez-vous me manquera, je le sais. Ce ne sera plus pareil de continuer hors comptage. Car j'arrive au dernier tiers du temps imparti et je n'en suis qu'au tout début du roman donc, je confirme, il ne sera pas fini le 30 novembre, même si le total de mots pourra être atteint. Nous verrons bien.
       Je me suis souvent demandé si l'envie d'écrire, qui me travaille depuis que j'ai sept ans à peu près, n'était pas une jolie histoire que je me racontais. Ah ! j'aurais bien aimé être écrivain mais… (complétez les pointillés par n'importe quelle excuse). Tout comme les gens justifient parfois leurs choix de façon absurde. Une voisine une fois disait : "Ah, j'aurais adoré avoir un deuxième enfant, ç'aurait été mon rêve, mais j'ai repris une formation d'aide-soignante alors ça n'a pas été possible". Heu… Non. Pas vrai. Cela aurait été plus difficile certes ; mais des milliers de personnes en formation ont un enfant chaque année, et une formation ne dure pas dix ans non plus. C'est donc un choix (partiellement assumé seulement). Il n'y a aucun mal à avoir tel nombre d'enfant, c'est juste dommage de se justifier de travers et de se mentir à soi-même.
       Donc, suis-je écrivain dans l'âme sous prétexte que j'ai toujours voulu faire ça, que la maîtresse écrivait dans le bulletin de CE2 que c'est bon, je pouvais arrêter d'écrire des histoires tout le temps, que j'ai toujours écrit malgré tout, enfant ? Pas forcément.
       S'il faut se lever le matin avec une faim dévorante d'en découdre avec le papier, je ne suis pas écrivain.
       S'il s'agit de construire une histoire lisible, surgie de soi sans même savoir d'où elle venait, peut-être que si. Je suis prof de français. Le cliché terrible : la moitié des profs de français n'ont-ils pas un manuscrit caché dans un tiroir ? L'avantage malgré tout est que je sais lire un livre, repérer les ficelles, une structure. Ce que j'ai pu écrire ces dernières sessions n'avait rien de génial, sors de ce corps, Proust, tu t'es égaré. Mais je peux affirmer sans aucun problème que j'ai lu, publiés, des récits de moins bonne qualité. Ou disons beaucoup plus plats et conventionnels, voire creux (parfois tu lis un truc et tu n'en reviens pas… comme cette prof qui était chargée de notre préparation à l'agreg, littérature du XXe siècle, qui était agrégée elle-même forcément, mais qu'on trouvait bête comme ses pieds, comment avait-elle fait ?). La publication d'un texte et son intérêt sont deux éléments très fluctuants. Je ne dis pas que je devrais être publiée, ou que je suis jalouse de ceux qui le sont. Certainement, les éditeurs pondèrent leur lecture en se demandant ce qui répond à une demande. Il y a une demande pour les bluettes sentimentales et prévisibles. Cela justifie leur publication. Tout cela fait que quand tu écris tout seul chez toi à 5h40, rien ne t'indique aucun avenir pour ton texte. Tu l'écris juste pour lui-même. Comme motivation, c'est léger. 
       Avec cet article j'ai pu repousser le moment de m'y mettre de quinze minutes, mais, cette fois…allez… un petit effort...

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