lundi 2 novembre 2020

Sur des oeufs

            Une rentrée particulière.


            Reprendre le chemin du travail alors qu'un collègue a été assassiné, le jour des vacances, de la pire façon qui soit - décapité en pleine rue, sur dénonciation, alors qu'il était coupable d'avoir fait son travail.

            Passer le portail au pire de l'épidémie. Les chiffres sont plus mauvais aujourd'hui qu'au moment du confinement de mars, et on y va quand même.


              Devoir jongler avec les gestes barrière et le souci d'éduquer et d'instruire, quand même.


                Novembre. La nuit. L'ombre. L'humidité. La promesse du sombre.


                Lire hier des livres au fil de l'envie et tomber deux fois, dans deux ouvrages différents, sur un passage se déroulant le premier novembre. On était le premier novembre. Les signes, à nouveau.


              Et puis, cette douceur improbable. 16 degrés au petit matin.

              Ce rayon de soleil dans l'oeil en tournant le volant direction collège.

              Les élèves, toujours là, toujours partants.

              Celle qu'on ne reconnaît pas sous le masque, mais...ah non. Tout va bien. C'est une nouvelle. L'honneur est sauf.

              Le garçon qui rentre de son premier jour masqué et a troué la doublure à force de la grignoter. On le gronde. Intérieurement, on rit comme devant un poulain qui a usé son licol.

              Le petit qui déclare, très sérieux : "Ze suis là ! attends, z'enlève mon manteau, mes saussures et après ze te fais un câlin".

              Le même qui regarde l'ordinateur s'allumer et remarque : "Oh ! c'est une pomme croquée !".


               Alors, on y va. On se glisse dans novembre comme auprès d'un feu de bois.

               Car tant que mes enfants vont bien, la vie continuera.

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