mercredi 30 janvier 2019

Perspective

     C'est intéressant, une perspective. Tu regardes un bâtiment, une montagne, un objet. Tu l'observes bien. Tu te fais ton idée sur le sujet.
     Et puis, tu te rapproches, tu t'éloignes. Tu fais le tour. Tu découvres tout autre chose. L'objet n'a pas changé mais ton regard posé sur lui, si.


     Exemple en direct (sans triche). Regardez la photo ci-dessus. J'ai fait comme d'habitude : photo avec mon téléphone (on est loin de la photo affûtée avec éclairage mesuré au parapluie sur fond neutre), envoi du document sur mon ordinateur via ma messagerie, insertion du document dans l'article.
     Sauf que non.
     La photo ne se transfère pas.
     J'essaie une fois, deux fois, récupère à chaque fois un brouillon vide dans ma boîte mail, m'impatiente, je vous ai dit que je n'avais aucune patience ? non parce que je n'ai aucune patience. Comme dans AUCUNE - PATIENCE. 
     Et puis c'est vrai, à quoi bon, elle est moche de toute façon, cette photo ? oui mais non. J'avais décidé de la mettre et puis qui est-ce qui décide, hein, les machines ou moi ?
    "Et pourquoi tu ne la mets pas dans l'article directement depuis le téléphone?" me souffle la petite voix de la raison tout à coup.
      Ah oui, tiens.
      J'y avais pas pensé.
      C'est juste si incommode d'écrire sur un écran miniature que je n'ai pas fait le lien. Mais au fond, pour une image, ça marche. La preuve.

     Bon, ce n'était pas du tout mon propos, mais on se rejoint. Regarde les choses autrement.

     J'ai lu il y a quelques années Opération bonheur, de Gretchen Rubin. Je vous recommande, d'ailleurs. Bon, je préfère le titre d'origine, Happiness Project, mais j'avais tellement aimé ce livre que je l'ai racheté en français pour pouvoir le prêter à des amies, et il est vrai qu'il a un peu circulé. Au passage, et je m'égare, Gretchen Rubin est un auteur très agréable, et j'ai été surprise une fois de la voir répondre à un mail où je lui citais un auteur, bref, passons - c'est toujours étonnant de voir que le nom sur la couverture du livre correspond à une personne "en vrai" qui peut te parler pour de vrai !

       Elle explique dans ce livre avoir porté, un temps, un podomètre pour mesurer à quel point elle bougeait… ou pas. La réponse étant plutôt, ou pas. Convaincue, j'ai alors acheté ce modèle, de la marque Omron, qui me suit donc depuis quoi, quatre ans ? (et deux piles seulement, ce qui est peu - actuellement, le signal de batterie faible s'allume, ce qui veut dire que je n'ai plus que 6 mois d'autonomie environ - et non je ne plaisante pas).
       Elle a assez vite cessé de le porter, une fois comprises les données qu'elle voulait en retirer. Moi, non. Je le glisse chaque jour dans ma poche, dans mon soutien-gorge, relié à une bretelle, un passant de pantalon, ou n'importe quoi qui dépasse, par un petit cordon. 
       Objectif officiel : 10 000 pas par jour. J'y parviens très rarement. J'aurais dû porter ce truc quand j'étais étudiante en ville, j'aurais explosé les scores tous les jours.
         Mais j'y ai gagné un bénéfice énorme. 

        Je me souviens avoir grimpé les marches du collège d'un pas lourd, jusqu'au deuxième étage. Encore une journée, encore un cours… 
               Cette lourdeur a disparu avec le podomètre. Il transforme l'effort en gain mesurable. Je fais les mêmes gestes mais ne les lis pas pareil. Encore un étage ? chouette, je gagne quarante pas. Une photocopie à faire en bas ? ah non je n'attends pas la pause, j'y vais tout de suite, ça me fera un aller-retour de plus ! Alors certes, les 10 000 pas sont atteints une fois par semaine, maximum. Mais j'ai sûrement doublé mes doses quotidiennes, et avec bonne humeur. Cela s'étend à d'autres aspects. Les volets roulants de la salle à ouvrir le matin ? Pfff, ça fatigue les bras. Ah oui ? Ah oui mais non ! ça les muscle ! voilà ce que j'ai décidé depuis septembre, depuis que j'ai décidé de faire de la danse, et je les ouvre à toute vitesse, parfois en équilibre sur un pied (… mais loin des regards pour protéger ma dignité). Une file d'attente au magasin ? En équilibre sur un pied, l'autre tout près pour faire semblant d'être debout, et le temps passe trop vite !
           Un autre bastion : le dos. Cette tendance à courber l'échine, à plier le dos, encouragée par les écrans, le travail assise à une table. La flemme de se tenir bien droit. Je commence à entrevoir une piste : quand je me redresse, à présent, je sens bien que cela soulage le ventre, le diaphragme, la cage thoracique. Alors, je ne me dis plus : "Tiens-toi droite". Mais "Soulage ton ventre". Et j'en retiens la sensation agréable, pas la contrainte. Ce n'est pas se mentir. C'est voir l'autre perspective.

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