dimanche 25 février 2018

Sommeil

Vacances.

Deux nuits de suite à dormir à volonté. Ou presque. Quand on a des enfants les volontés se mélangent. Mais tout de même, huit heures, facile. Au réveil, le léger mal de dos d'avoir passé tant de temps au lit.

Et puis tout à l'heure, sous la couette avec ma liseuse pour continuer, finir bientôt L'Assommoir de Zola, sommeil à nouveau. Repousser les coussins. Se lover. Sentir la conscience flotter. Remonter à la surface, d'un coup, un quart d'heure plus tard peut-être ? Parce que ça y est. Le somme est passé.

Un luxe absolu.

L'Assommoir. Pas lu depuis si longtemps, vingt ans peut-être. Je n'en avais gardé aucun souvenir à part que c'était bien. La pauvre Gervaise, pas aidée par le sort. Comment corrompre une bonne nature. Comme on voudrait l'aider. La petite Lalie battue comme plâtre. On voudrait se consoler : c'est de la fiction. On se raisonne : Zola n'a pas eu besoin d'inventer bien loin. Il y a eu, il y a sûrement encore des Gervaise et des Lalie.

jeudi 22 février 2018

Relire

     Parmi les ouvrages empruntés samedi, Relire, de Laure Murat (éditions Flammarion). Je l'avais pris dans ma moisson précédente, ouvert vendredi matin, découvert qu'il m'intéressait vraiment mais pas pu dépasser la page 170 d'ici le soir. J'ai courbement attendu que la bibliothécaire passe avec son petit chariot, le dépose dans le rayon, pour le reprendre, l'air de rien. Non qu'il manquera à quiconque, j'imagine. Mon forfait sera oublié au prochain retour.

     J'ai toujours beaucoup relu. Enfant, il me semble que nous avons tous le réflexe de recommencer ce qui nous plaît. Revoir un film, relire un livre, revivre le moment rituel de plaisir. La relecture dans mon cas était aussi commandée par le nombre limité de livres qui ont pu m'entourer à un moment, j'imagine. Je me souviens avoir scotché une feuille supplémentaire dans le cahier d'emprunts à l'école, lisant un à un tous les livres disponibles de la classe. C'était en CM1, peut-être. Je me souviens, en CE1, finir plus vite que tous le monde les exercices parce qu'après, on pouvait aller lire seul au fond, dans le coin bibliothèque. A la maison, très peu de livres d'enfants. On n'en achetait guère. On n'achetait rien, globalement. J'ai été sauvée par mon insistance à m'inscrire à la bibliothèque municipale. Dès lors, chaque samedi après-midi, le ballet des livres se faisait. Trois ou quatre par semaine, je suppose. 

     Relire a toujours été évident. Relire pour retraverser le plaisir, retrouver les personnages qu'on a bien aimés. Relire pour débusquer les petits détails qui nous auraient échappés à première découverte. Mais relire trop souvent fait "rétrécir", je l'ai largement éprouvé. On finit par épuiser la matière brute. Sauf en littérature, naturellement, la grande, où les mots sont la matière, plus que l'intrigue, et portent un terreau infini. C'est peut-être à cela qu'on reconnaît un livre précieux. L'envie de le relire ne passe jamais. 

     J'ai relu ensuite pour des raisons scolaires, universitaires, professionnelles. Peut-être ma mémoire est-elle médiocre. Mais je peux affirmer, après quatre, cinq, six lectures du Malade Imaginaire, que j'aurais encore besoin de le relire ou revoir avant de le faire étudier. Comment peut-on connaître une oeuvre en une lecture? Si certains y parviennent, ce don m'échappe. Comme ces personnes qui reviennent de l'étranger et disent : "On a fait la Thaïlande". Fait ? La case est cochée ? Vous avez tout vu, tout vécu ? On peut rayer le pays de la carte ?

     Je n'aurai jamais "fait" la Recherche de Proust, bien sûr. Mais je n'aurai jamais fait tout livre m'ayant suffisamment procuré de plaisir pour que je veuille le retrouver un jour, après un temps d'oubli.

     La lecture est infinie.
     Belle nouvelle !

dimanche 18 février 2018

Razzia

     Je n'ai même pas essayé de me limiter. Quand je passe le seuil, je sais que la quête n'aura d'autre limite que le temps imparti et la taille de mon sac.
     J'ai déambulé dans les rayons et pris absolument tout ce qui me tentait. Tout. Sans même me demander si c'était raisonnable, si c'était le bon moment. J'ai rempli mon sac à l'instinct, sans limite, sans complexe. Tiens ! intéressant ça ! je n'y avais jamais songé ! allez hop. Dans le sac.
     Au bout d'un moment, le sac a pesé et j'ai fait une pause pour compter. Oh oh. Plus beaucoup de marge. Il était temps de penser aux enfants.
     Je suis donc passée dans leur grand rayon dédié, ai sélectionné ce qui me semblait pouvoir leur plaire.
     J'avais atteint les limites. Celles du sac et celles de ce que mes bras pouvaient porter. Je suis allé enregistrer les nombreux fruits de ma quête à la borne automatique.
       Coût : 20 euros. Pour un an.
       Et quinze documents.
      J'aime, j'adore, j'adule les bibliothèques. On y trouve de tout. Ce qu'on voulait, ce qu'on ignorait, ce qu'on pensait ne pas pouvoir, ne pas vouloir. Tout est disponible, autorisé.
      Un livre sur la relecture, un roman de filles, une méthode pour apprendre le russe en trois semaines, un magazine photo pour l'homme, un livre de dinosaures pour le grand.
     Et j'en passe !
     Je n'ai aucune velléité de frugalité à la bibliothèque. C'est l'abondance à portée de carte.

dimanche 11 février 2018

Repli


      Chez nous, il ne neige jamais.
     Mais jamais.
     Quelques flocons dans l'air une fois par an, et encore, pas toujours. Un peu de blanc dans les chemins, à la limite. De la vraie neige, non. Jamais. La dernière fois, j'ai fait un igloo avec une amie, on s'était bien amusées. C'était il y a douze ans. Je le sais : il y avait les Jeux Olympiques d'hiver. Et vu le lieu où nous vivions, ça nous ramène bien à douze ans.
     Autant dire que la semaine écoulée a eu de quoi surprendre. Du bon et du moins bon. Le bon : l'école d'un de mes fils n'était pas accessible, ça m'a évité les noeuds au cerveau pour savoir si je-devais-aller-au-travail-la-peur-au-ventre-sur-route-gelée ou pas. Un enfant à la maison : je reste. Point. Le moins bon : les collègues un peu contraints de venir, le mot d'ordre de fermer l'établissement étant resté du cas par cas, et coincés sous la neige…pas terrible.
     Elle a fondu. La vie est redevenue plus simple. Mais quand même c'était beau. Le silence particulier du paysage enneigé. Le petit crépitement des flocons quand ils tombent. 
     Le goudron est de retour. Du blanc au noir.

jeudi 8 février 2018

Incertitude

     Je n'ai rien contre la neige. Je regrette même de la traiter avec une certaine ingratitude : on t'annonce qu'un phénomène exceptionnel par chez nous va se produire, il transforme toutes les laideurs ordinaires en sublimes compositions blanches et on se plaint à cause de la route ! Si la neige pouvait tomber exclusivement sur le bas-côté, tout irait bien.

     Cette année je suis "sauvée" par les enfants. Pas de car mardi. Le second est dans une école à sept kilomètres. La neige couvrait le sol. Hors de question que je le balade en voiture dans ces conditions. La question du "je pars au travail ou pas" était donc résolue par sa présence à la maison.

     La question se posait à nouveau pour ce matin : un gros gel, a priori, mais la neige a fondu sur ma route, du moins.
     Verdict tombé hier soir : pas d'école pour les enfants. Elles sont fermées, tout simplement. Mon homme travaille à cinq minutes et verra s'il peut rouler ou non. Moi, rien de possible avant qu'il rentre à midi : si ça a fondu, là oui, je pourrai partir.

      Autant dire que tout cela est joyeusement confus.
     Il neige encore demain, on n'en est pas sorti. Heureusement c'est un jour où je ne travaille pas. Je vais donc rester là et les enfants avec, je pense. Mon rendez-vous chez le dentiste à annuler probablement.

     Tout ceci n'est pas bien grave. Seulement, ce sentiment de doute, d'hésitation, "j'y vais ? non?" est usant. Je ne le supporte pas. Heureusement que l'école des enfants a tranché pour moi !

dimanche 4 février 2018

Poubelle

     Nous avons pris la décision il y a trois semaines.
     Notre poubelle allait être changée.
     En cause, la vieille-toute-abîmée qui séjourne à la porte, côté jardin, pour récolter ce qui est destiné au compost. Le vent a arraché son couvercle : pas pratique. Bon. On aurait survécu, n'est-ce pas. Mais moins pratique. Nous nous sommes dit qu'acheter une poubelle neuve pour la laisser dehors, dommage. Autant changer celle de la cuisine, bonne qualité, qu'on a depuis dix ou douze ans, par le même effet redonner un coup de peps visuel à la cuisine et récupérer cette poubelle plus grande, fiable, pour le compost.
     J'ai écumé les boutiques vers chez nous. Nous vivons dans une petite ville (15 000 habitants, environ) et les fournisseurs de poubelle sont peu nombreux. Je n'ai pas trouvé ce que je voulais. Une Brabantia parce que la précédente en est une, très simple, très fiable, garantie dix ans. Une couleur crème pour égayer la cuisine. Voilà qui coûte un bras mais, étrangement, je n'ai pas de problème avec ça. Payer 112e une poubelle est en soi stupide. Payer 112e pour un objet volumineux, qu'on voit tous les jours, qu'on actionne plusieurs fois par jour, mais faire en sorte qu'il nous plaise toujours autant et n'aie jamais besoin d'être changé d'ici quinze ans, me semble finalement une affaire rentable. Ne jamais lésiner sur la qualité si tu es sûr du résultat, c'est mon credo. Après, on enterre le dossier poubelle pour l'éternité. Je ne pense pas avoir de pulsions de poubelles tous les deux ans, très sincèrement…
     Et puis, commande sur Amazon. Pas mon idéal marchand, pas trouvé autrement, à part faire 100 bornes en voiture, et encore. Retard du colis. Long retard du colis.
     Il a fini par arriver hier. 
     Pour mon anniversaire.

     Univers, tu m'as envoyé une poubelle pour mon anniversaire.
     Le message, tu m'expliques ? 

     Il va falloir faire le tri. Prendre le temps d'en jeter. Eliminer l'inutile, l'encombrant.
     D'accord. Je note.

    En attendant j'ai pu aller à Paris vendredi, j'ai pu retourner à Orsay et je confirme : visiter, ce n'est pas inutile, encombrant. Quelle merveille que l'art. Cross, Morisot, Van Gogh. Monet. 

     Des merveilles à moins d'une heure de la maison.

     Quelle chance.